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Louis XIV au jour le jour

1er janvier 1685: Versailles

1 Janvier 2017 , Rédigé par Louis XIV au jour le jour Publié dans #Journal du marquis de Dangeau

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/0/01/Portrait_Of_Phillippe_De_Courcillon.jpg/250px-Portrait_Of_Phillippe_De_Courcillon.jpg

Lundi 1er janvier

 

à Versailles

 

Le roi et Monseigneur, avec tous les chevaliers de l'ordre qui se trouvêrent ici, entendirent la messe des chevaliers, et il ne se trouva point de prélat de l'ordre pour la dire. 

 

L'après-dînée ils furent à vêpres, et ne sortirent point de tout le jour 

 

Le soir il y eut appartement dans le petit appartement du roi, comme il y avoit toujours été depuis le retour de Fontainebleau.

 

M. le Premier, le père, qui étoit venu ici pour la cérémonie des chevaliers, pria le roi à son lever de trouver bon que son fils eût son brevet d'affaires (1) dont sa vieillesse et ses incommodités l'empêchoient de jouir, l^e roi y consentit*. 

 

S. M. donna à monseigneur le Dauphin 4,000 pistoles d'étrennes, outre les 1,500 qu'il lui donnoit par mois. 

 

Le roi donna aussi de pareilles étrennes à Monsieur. 

 

Les gouverneurs et lieutenants de roi de provinces s'assemblèrent, avec la permission du roi, dans la chambre de M. de Noailles, pour examiner l'écrit que MM. les maréchaux de France avoient fait contre eux, et voir en même temps l'écrit de M. de Montauzier pour soutenir le parti des gouverneurs.


* M. le Premier s'appeloit Beringhen. 11 y a un lieu de ce nom près de Nimègue qui ne leur a jamais appartenu et d'où ils sont ; le père de celui-ci étoit à un gentilhomme de Normandie, chez qui Henri IV dîna dans les dernières guerres de la fin de la Ligue, et trouva sesarmessi propres et si bien entretenues qu'il voulut savoir qui des domestiques de la

(I) Le brevet d'affaires ou d'entrée donnait iIroit aux premières entréesche* roi.

maison en prenoit soin. C'était Beringhen; et le roi qui étoit curieux en firmes, dont il se savoit si bien servir, le prit à la prière du gentilhomme. Dans les suites, il devint premier valet de chambre de Marie de Médicis, et son fils le fut du roi. Ce fils dont il s'agit ici étoit homme d'un grand sens, et qui fut mêlé dans tant de choses de la plus intime confidence d'Anne d'Aulriche, qu'il en fut chassé, et qu'il étoit aux PaysBas à la mort de Louis X11I. Le prince, qui mourut en héros et en saint, et qui se défioit avec tant de raison de la reine et de Monsieur pour un bon gouvernement après lui, y pourvut aussi sagement et exactement qu'inutilement, et remplit par son testament tout ce qui étoit vacant ; et comme la charge de grand écuyer l'étoit depuis l'exécution de CinqMars, il la donna au duc de Saint-Simon, son favori, son premier écuyer, et qui avoit été premier gentilhomme de sa chambre. Il le lui dit publiquement, et le duc de Saint-Simon reçut les compliments de toute la cour ; le roi étant mort trois ou quatre jours après, Chavigny, secrétaire d'État, qui avoit tenu la plume, dit à la reine qu'il avoit laissé le nom du duc de Saint-Simon en blanc , bien qu'accompagné d'un éloge que le feu roi avoit dicté, pour qu'il tînt la charge d'elle autant que du roi, ou que, si elle en vouloit nommer un autre, elle pût par là s'acquérir une créature considérable. Ellenomma le comte d'Harcourt qui l'en paya bien depuis quand il abandonna l'armée du roi en Guyenne, pour faire révolter l'Alsace, dont on ne le tira qu'avec le gouvernement d'Anjou mis sur le grand pied, tandis que le duc de Saint-Simon sauva la Guyenne par Blaye, et ne voulut ni des honneurs de prince étranger, ni du bilton de maréchal de France, quoique S. Megrin, chevalier de l'ordre , lui vint offrir de la part de la cour, et ne voulut pas que sa fidélité partit achetée ; il lit les fonctions de grand écuyer aux obsèques, après quoi, au lieu de lui envoyer ses provisions, le comte d'Harcourt fut déclaré- P |p fit appeler, et ils eurent longtemps des gardes. Beringhen, à la nouvelle de la mort du roi, étoit revenu à la cour, mieux que jamais avec la reine, pour qui il avoit été chassé, et, profitant du dépit du duc de SaintSimon qui voulut vendre sa charge, il l'acheta 400,0(»0 francs, ;i la grande surprise de tout le monde de le voir premier écuyer : c'étoit un fort homme d'honneur, heureux en enfants , en alliances, en amis, en conduite, qui couronna sa vie par une sage et digne retraite chez lui, :\ Paris, où, à ses heures, il vit jusqu'à sa mort les gens les plus distingués, jusque-là que, n'étant plus en état d'aller à Versailles une fois l'an voir le roi comme il avoitfait d'abord, le duede Beauvillierseut ordrede lui mener les enfants de France. Lorsqu'il vendit sa charge de premier valet de chambre , il n'en conserva pas les entrées, outre que ce n'étoit pas l'usage alors, et ce ne fut que depuis qu'il eut ce brevet d'affaires ou de secondes entrées, qu'il fit passer à son fils. C'est encore ce sage vieillard qui, de sa retraite à Paris étaut allé voir le roi à Versailles quiprit plaisir à lui en montrer les beautés, lui dit pour toutes louanges que Versailles étoit un favori sans mérite : c'est encore lui qui, apprenant la ridicule dispute entre sa belle-fllle et la duchesse de Brissac Saint-Simon, à qui reculeroit dans une rue fort étroite où leurs carrosses ne | louvoient passer, et où elles restèrent paisiblement cinq heures, l'une alléguant sa housse, l'autre le carrosse du roi dont elle se servoit par la charge de son mari, alla lui-même la faire reculer et faire excuse à madame de Brissac.

 

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