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Louis XIV au jour le jour

18 février 1653: Journal de santé

18 Février 2017 , Rédigé par Louis XIV au jour le jour Publié dans #Journal de Santé du Roi

6664993-L

Vers la fin du mois, le roi, s'étant très échauffé à répéter un ballet, fut incommodé d'un rhume qui lui tomba particulièrement sur le nez, dont il fut si considérablement incommodé, qu'il avait de la peine à parler et à respirer, et, voyant qu'il s'en plaignait extraordinairement, je lui fis préparer un parfum qui arrêta le cours de l'humeur en deux jours.

 

Voici la préparation dudit parfum:

 

PARFUM POUR LE ROI.

Recipe : Carabi }

, . ,.,. } ana ïi. Sacchan cand-idi )

Fac pulvim projiciendam super primas, pro suffimigio in gravedine et incipiente coryza, paulo ante ingressum lecti, quod optime successit.

 

18 februario 1653

 

En même temps le roi ressentit au visage quantité de dartres vives et farineuses, avec démangeaison et écorchure de l'épiderme.

 

Nous avions appréhension qu'elles ne fussent de même nature que celles qui arrivèrent à S. M. ensuite de sa petite-vérole.

 

Mais bientôt nous avons été délivré et du mal et de l'appréhension, par la seule application de ma pommade de baume, qui m'a réussi heureusement en semblable occasion, et l'incommodité s'est bientôt passée.

 

POMMADE POUR LE ROI.

 

Recipe : Cerœ albissimœ sij.

Olei atnygdal. dulcium 3x.
Liquefac simul et agita cum spatula lignca.
Addenda post coagulationem. Balsami Perumani ni-
gri, q. s.
Fac balsamwm.

 

Peu de temps après, le roi s'étant échauffé à danser et répéter son ballet (1), fut saisi, le huitième jour de mars, après avoir soupe, de frissons par tout le corps, qui lui durèrent plus d'une heure, et furent suivis d'un accès de fièvre très considérable qui lui dura toute la nuit avec beaucoup d'inquiétudes. Tous ces accidents se trouvèrent arrêtés fort heureusement, et sans retour, après une saignée qui fut faite le lendemain matin.

 

(1) Le Ballet-Royal de ta nuit.

Ce ballet avait été dansé au Petit-Bourbon, le 23 février 1653.

Le jour suivant, S. M. prit un lavement, et le lendemain une médecine qui fut préparée de la manière qui suit:

 

BOUILLON PURGATIF POUR LE ROI.

Recipe : Crustalli mineralis

Cremorts tartan

Mannœ sjjS.

Folliculorum senœ sij.

Bulliant, leviter in infusione carnis vituline, herbis re-
frigerantibus attente.
Fac colaturam.
Sumende mane in aurora.

 

 

Ce remède a purgé le roi si doucement et avec tant de succès, que j'ai pris résolution de ne purger jamais S. M. que de cette manière, à moins qu'il n'arrivât quelque maladie considérable qui demandât une autre purgation

 

Et comme le roi s'est fort bien trouvé de ce remède, il y a de l'apparence qu'il en ressentira Tes mêmes effets quand il aura besoin d'être purgé, étant certain qu'il n'a pu se résoudre à prendre une médecine selon les préparations ordinaires, outre qu'il n'a aucune répugnance maintenant en l'opération dudit remède,

N. B. — Je me suis bien trouvé en la suite des temps et en plusieurs occasions de l'effet de ce bouillon.

Flux de ventre du roi, fort opiniâtre, qui approchait de la dysenterie et de la nature du flux mésentérique, lequel dura plus de huit mois.

 

Sa cause et sa guérison.

 

 

 

 

 

Sur la fin du mois de mars de la présente année, après plusieurs fatigues durant un ballet dansé à plusieurs reprises par S. M., entremêlées de quelques désordres et dérèglements à l'égard du roi, sur des vivres, et même ensuite de quelques excès de breuvages sucrés et artificiels, particulièrement de limonades, et pour avoir trop mangé des oranges de Portugal, le roi ressentit une douleur et faiblesse d'estomac fort extraordinaire

 

Et comme il voulut, à son ordinaire et contre les avis que j'avais donnés, garder religieusement le carême, S. M. fut, après Pâques, si fort travaillée d'un flux de ventre si considérable qu'elle rendait les aliments par les selles sans aucune coction, avec abondance de glaires et autres matières de mauvaise condition.

 

Ce mal, s'augmentant de jour en jour, n'empêcha pas S. M. de commencer bientôt après une des plus rudes campagnes qu'elle eût faites par le passé, sans se pouvoir résoudre à faire en repos et à l'aise les remèdes que j'avais proposés.

 

Il est bien vrai que quelques jours auparavant j'avais commencé une manière de régime qui lui avait fait du bien; mais l'impatience d'aller à la guerre et de s'exposer à des fatigues extraordinaires, renversa tout l'avantage que S. M. commençait déjà à recevoir des remèdes, et, continuant ses voyages, son mal empirait à vue d'œil.

 

En effet, si, après avoir campé avec son armée en plusieurs lieux fort incommodes, on n'eût pas séjourné quelques jours à Ribemont (24 juillet 1653) pour attendre des nouvelles de la marche des ennemis que l'on croyait avoir dessein d'assiéger Saint-Quentin, son mal se fût rendu beaucoup plus grand et plus incommode.

 

Je me servis de cette occasion pour lui faire prendre quelques remèdes particuliers qui nous donnèrent un peu de relâche pour supporter plus facilement les fatigues de la guerre.

 

Quelques jours après, son mal augmentant, S. M. donna beaucoup d'appréhension aux principaux de la Cour, ce qui m'obligea d'avoir recours aux remèdes lorsque nous arrivâmes à Montmédi, où je fus contraint de lui faire prendre un lavement en descendant de cheval, étant encore tout botté, et en un lieu le plus désolé et le plus incommode de tout le royaume.

 

L'effet de ce remède donna un peu de force et de courage au roi, en sorte qu'il partit le lendemain matin pour continuer ses desseins et sa marche. Durant toutes ces fatigues et les incommodités d'une si longue et si fâcheuse campagne, le roi, ne pouvant faire exactement ce qui était

 

nécessaire pour rétablir sa santé, et ne voulant pas perdre une seule occasion, consentit au moins à suivre et garder le régime de vivre le plus régulièrement qu'il lui serait possible, puisque d'ailleurs il ne pouvait donner le temps aux remèdes que je lui proposais, remettant toutes choses après la campagne, alors qu'il serait de retour à Paris, S. M. m'ayant dit plusieurs fois, après la remontrance que je lui faisais de la conséquence de son mal, qu'elle aimait mieux mourir que de manquer la moindre occasion où il y allait de sa gloire et du rétablissement de son État.

 

En quoi l'on a sujet d'admirer la grandeur de son âme et la patience extraordinaire de ce prince, accompagnées d'une volonté admirable

 

M'ayant accordé de se priver de toutes les sortes d'aliments que je croirais être contraires à son mal

 

Qu'il ne mangerait que ce que je lui ordonnerais, et se coucherait un peu plus tôt et plus régulièrement qu'à l'ordinaire.

 

En effet, S. M. s'est empêchée huit mois entiers de manger ni fruits crûs, ni salades, ni aucune viande de dure digestion; sinon qu'elle a été obligée quelquefois de manger des viandes froides aux haltes où elle ne pouvait pas avoir, comme devant, les officiers de la bouche.

 

Cependant la continuation de son mal me donna beaucoup d'inquiétude, parce que je prévoyais bien que la suite en pouvait être très dangereuse.

 

En cette grande perplexité, j'ai pris enfin la résolution, après avoir bien examiné toutes choses, de tenter quelques remèdes spécifiques et particuliers pour suspendre en quelque façon le mal et pour empêcher son progrès

 

Et, comme nous n'avions point de repos, j'ai trouvé moyen d'inventer et de préparer moi-même des compositions qui n'étaient pas difficiles à prendre et n'empêchèrent pas S. M. de monter tous les jours à cheval et de continuer ses grandes entreprises

 

De sorte que l'on peut dire avec vérité, que Dieu m'ayant inspiré ces remèdes, le roi a reçu un soulagement sensible, sans perdre aucune occasion de la campagne.

 

S. M., ravie de cette invention, continua de prendre tous

 

Ce soulagement fit passer à S. M. toute la campagne avec plus de courage et de vigueur, et supporter les fatigues de la guerre avec de très heureux succès

 

De manière que le roi eut la satisfaction de voir, à la fin de ladite campagne, ses affaires en meilleur état et sa santé plus affermie que quand il la commença

 

Et, incontinent après son retour, nous avons achevé l'usage de nos remèdes avec un peu plus de repos et plus de suite, qui ont si heureusement réussi, qu'après avoir reconnu leurs bons effets, j'ai assuré S. M. qu'elle était entièrement guérie, et qu'il n'y avait plus rien à craindre à l'avenir, voyant son estomac et toutes les parties nourricières en meilleur état qu'elles n'avaient été depuis qu'il était au monde.

 

Ce qui a réussi comme je l'avais prédit.

 

Et puisque Dieu m'a donné la lumière des remèdes que j'ai inventés pour l'entière guérison du roi, j'ai sujet de lui rendre grâce et de faire ici une exacte relation de l'ordre que j'ai tenu pour les faire pratiquer à S. M., afin que les mêmes remèdes lui puissent servir si elle retombait en semblables maux, ou du moins que ses enfants ayant cet avantage si la môme chose leur arrivait.

 

Ordre et suite des remèdes dont je me suis heureusement servi pour la guérison du flux de ventre lientérique du roi. 1653.

 

Après l'usage des lavements faits et préparés avec des têtes de bouillon blanc et de (/raine de lin, Veau rosée, l'huile d'amandes douces et la manne, je me suis servi de mon eau martiale, qui ne m'a jamais manqué en semblable occasion, non pas môme à flux mésentérique, hépatique, et autres, invétérés d'un an ou deux; laquelle pourtant n'a pas guéri le roi, comme j'avais espéré au commencement de son mal, mais les jours ce que je lui avais préparé, n'ayant aucune aversion à semblables remèdes, qui, petit à petit et insensiblement, diminuaient son incommodité

 

Ce qui lui donna espérance et l'obligea d'être encore plus ponctuel à son régime et à se coucher de meilleure heure.

 

Elle a disposé au passage de la matière, de sorte que les autres remèdes ont produit des effets admirables, comme l'on peut connaître par la suite de ce discours, en une occasion où il y avait fort peu d'espérance d'un semblable succès, non seulement à l'égard de la faiblesse des parties et de la longueur du mal, mais particulièrement pour les grandes et extraordinaires fatigues que S. M. était obligée de faire pour l'urgente nécessité de ses affaires et pour le rétablissement de son État.

 

Le second remède a été inventé, voyant que le premier était incommode et que le roi, après en avoir usé quelque temps, ne le pouvait plus supporter, ayant une aversion à ladite eau martiale.

 

Ce qui m'a obligé de préparer l'eau d'une manière particulière et excellente, de laquelle j'ai fait des tablettes, afin que S. M. les put avaler sans peur et sans aversion, outre que ce remède ne l'empêchait pas de monter à cheval et de fatiguer à son ordinaire.

 

Le bien que nous avons tiré de ce remède a été assez considérable, vu que son estomac s'est un peu fortifié et que les matières n'ont pas été aussi mauvaises.

 

Si, durant son usage, le régime de vivre avec le repos eût été ponctuellement gardé, je ne doute pas que la guérison n'eût été parfaite, comme j'ai remarqué en plusieurs personnes travaillées de la même incommodité.

 

Le troisième, que j'appelle specificum nostrum stomachicum, a été par nous inventé pour fortifier l'estomac et toutes les autres parties nourricières, voyant que les premiers remèdes n'avaient pas réussi comme je m'étais promis.

 

En une si urgente nécessité, nous avions besoin d'un si excellent remède, qui non-seulement a arrêté le flux de ventre, mais a rétabli toutes les parties susdites en un meilleur état qu'elles n'avaient été depuis la naissance de S. M. De sorte que j'ai grand sujet de rendre grâce à Dieu de m'avoir donné les moyens et la lumière pour la parfaite guérison du roi, d'une incommodité qui était de la dernière importance.

 

Et, comme les remèdes que j'ai employés pour un si heureux succès peuvent servir en d'autres occasions, j'ai voulu laisser par écrit les ordonnances, avec toute l'exactitude et la fidélité qui m'a été possible.

AQUA NOSTRA MARTIAUS.

 

Recipe : Limaturœ chalybis ?j/3.
Succi maii aurantii -ij.

Digère simul in vase vitreo viginti-quatuor horis in balneo-maris. Postea affunde ffeiiij aquce fontanœ purissimœ. Fac ilerum ownis digestio in eodem bàlneo-maris, per viginti-quatuor horas, vase optime clauso. Facta tandem levi ebullitione per horam. Separata aqua à fœcibus servanda in vase vitreo in loco frigido, de qua capiat §vj pluribus diebus continuis in awrora duabus horis antejentationem.

Pour le roi.i653. Vallot.

 

TABELLA NOSTRA MARTIALIS.

 

Recipe : Pulveris nostri martialis nostro marte concinnati, quinque grana.Tere in marmore, cum de ij gr sacchari candidi.

Misée ex arte, cum sacchari albissimi sj. Et addito quinque g' tragachanti aquœ rosarum vel buglossi tantillo soluta.

Fiat tabella sumenda mane jejuno ventriculo pauld anle jentationem. Hausta pluribus diebus continuis sine custodia.

 

TABELLA NOSTRA STOMACHICA.

 

Recipe : Spécifia nostri stomachici grvj.
Auri nostri diaphoretici g'jv.

Margaritam preparatam g'viij.

Misée simul cum S. Q. sacchari, et addito gummi tragacanthi aquœ rosanœ solutœ.

Fiat tabella sumenda horis matutinis pauli ante jentalionem, per mensemjulii. Pour le roi. — 4653. Vallot.

 

Ces trois remèdes ont parfaitement réussi pour la parfaite guérison du flux de ventre du roi, qui avait duré plus de huit mois, et n'a cessé que sur la fin d'une campagne fort longue et fort rude qui dura jusque dans le fort de l'hiver, et après le siège et la prise de Sainte-Menehould(l), durant lequel le roi ne voulut perdre aucune occasion d'aller de sa personne, et n'aurait jamais été maître de ladite place, qui était pour lors la plus importante de tout le royaume, pour rabattre les desseins des ennemis de S. M.

 

Lorsque j'ai vu sa dite Majesté en un si bon état, je lui ai donné des assurances qu'elle ne retomberait jamais en une semblable incommodité, les parties étant beaucoup mieux rétablies que par le passé.

 

En effet, j'ai vu, par expérience, que ma prédiction a été bien véritable.

 

Comme nous avons eu besoin d'autres remèdes pour achever glorieusement cet ouvrage, particulièrement de lavements de différentes manières, j'ai été obligé d'en laisser ici les ordonnances, afin que, en pareille occasion, elles puissent servir à l'avenir à S. M.

 

LAVEMENTS POUR LE ROI EN SON FLUX DE VENTRE.

 

Recipe : Jalapi Alexandrini }

„. • } ana 58.

Melhs rosacei \

Confectionîs mineralis ôvj .

Olei amygd. dulcium 5j.

Aquœrosanœ 5iiij.

Diffuse in ifep decoctionis hordei furfuris et seminis Uni.Fac clyster.

 

AUTRE LAVEMENT.

 

Recipe : Aquœrosanœ Siiij.

Olei amygd. dulcium 5ij

Jalapi Alexandrini

... , ana

Melhs rosace^

Dissolve in $v decoctione foliorum Thlaspi-verbasci et, seminis Uni.Fac clyster.

(f) 26 novembre 1653.

 

AUTRE LAVEMENT.

 

Recipe : Confectionis mineralis ?p.

Olei amygdal. dulcium 5j.

Mellis rosacei ?jp.

Aquœ rosanœ 5iij.

Dissolve in decoctione seminis Uni et hordei furfwis.Foc dyster.

 

AUTRE LAVEMENT.

 

Recipe : Mannœ )

„ „. > ana \]B.

Melhs commums ('

Bulliant leviter in decocto althœœ'totius radicis et symphiti majoris.

Dissolve : Olei amygdalium dulcium ?ip.
Electuarii lenitivi îiij.

Foc dyster.

 

AUTRE LAVEMENT.

 

Recipe : Aquœ rosanœ

„ ,. . ..,..[ ana |x.
Decocttoms semvms hni )

Dissolve : Axonqias gallinœ }

n t • • 4 • ana 318.

Butin recentis )'

Fac clyster.Injiciendum urgente dolore.

 

AUTRE LAVEMENT.

Recipe : Confectionis mineralis ?j.
Mellis rosacei |jj3.

In decocto capitis veronici ad talem cum semine Uni et radice althœœ.Fac clyster.'

 

AUTRE LAVEMENT.

 

Recipe : Mannœ ?ij.
Bulliant in decocto capitis veronici.
In cola.Dissolve : Jalapi Alexandrini 5j.
Mellis nenupharii Sj/3.
Fac clyster.

 

AUTRE LAVEMENT.

 

Recipe : Mellis rosacei

Jalapi Alexandrini;
Electuarii lenitim Jvj.

Aquœ rosanœ ?j/3.

Dissolve in decocto Thlaspi verbasci et furfùris fiordei.Fac clyster.

 

AUTRE LAVEMENT.

 

Recipe : Mucilaginis seminis psyllii et Uni in aqua rosana

extrada anal}.

Butiri recentis jii.

Dissolve in decocto althœœ totius folii Thlaspi wrbasci et veronica fœmina ex aqua et lacto parvulo. — Fac clyster.

 

Depuis la parfaite guérison du flux de ventre, le roi n'a ressenti aucune incommodité considérable, sinon qu'il fut un peu travaillé d'un rhume, et sur le commencement de l'hiver, après avoir souffert beaucoup de peine et de fatigue au siège de Sainte-Menchould, S. M. ressentit une grande douleur de tête, accompagnée d'une fièvre symptomatique, qui l'obligea de retourner à Châlons et de quitter le camp, après avoir fait la revue de son armée, et visité tous les quartiers où il y avait quelques désordres à cause des différends des généraux et autres officiers

 

Et, quoiqu'il fut fort pressé de douleur et de sa fièvre, il ne voulut jamais quitter le camp qu'il n'eût pacifié toutes choses et donné ses ordres pour l'avenir.

 

Enfin, après une longue fatigue, il arriva le soir à Châlons, par un grand brouillard, sans avoir voulu monter en carrosse depuis la tranchée jusqu'à Châlons.

 

Se voyant ainsi accablé de douleur, il se coucha sitôt qu'il fut arrivé.

 

En même temps, je lui ordonnai un lavement, et, le jour d'après, on lui tira trois poèlettes de sang (1)

 

Ce remède fit diminuer la fièvre et les autres accidents si considérablement, que, deux jours après, il se porta fort bien, contre son attente et l'opinion de toute la Cour qui appréhendait avec beaucoup de raison que ce prince ne tombât dans des accidents fâcheux et de longue durée, après avoir fatigué toute la campagne et supporté si longtemps des flux de ventre si opiniâtres et si importuns.

 

Le roi, ayant été si promptement et si heureusement guéri de sa fièvre et de sa douleur de tête, demeura quelques jours à Châlons pour reprendre ses forces, puis retourna au siège de Sainte-Menehould, où il continua ses soins et ses fatigues avec autant d'ardeur que s'il n'eût jamais ressenti aucune incommodité.

 

C'est une chose surprenante que la rigueur de la saison, ni les mauvais chemins, ni la difficulté des passages, ne l'empêchèrent point d'être une bonne partie du jour à cheval.

 

J'étais pour lors dans des appréhensions que.S. M. ne tombât malade, outre la crainte que j'avais de sa personne qui s'exposait si librement.

 

Aussi, priais-je Dieu, par sa sainte grâce, de le protéger en toutes ces occasions, de manière qu'il en est sorti glorieusement, ayant forcé les assiégés de se rendre et de remettre la place à son obéissance, ce qu'ils n'auraient pas fait sitôt, si S. M. n'eût été présente et payé de sa propre personne.

(1) Le 30 d'octobre, le roi ayant eu quelque légère indisposition, en fut soulagé par la saignée

 

Et tout ce jour-là, comme aussi le lendemain, S. M. fut visitée par les grands de la Cour, particulièrement sur le midi et sur le soir par Son Eminence, qui ne prend pas moins de soin d'une santé si précieuse qu'est celle de ce grand monarque, que de la gloire de son État et du progrès de ses armes.

 

Gazette de France, 3 novembre 1653. P. 2,000.

 

 

Je m'arrêterai seulement à faire la relation d'une dureté squirreuse, qui est survenue, à Sedan, au tétin gauche, au mois de juillet, semblable à celle dont je l'avais guéri l'année précédente au tétin droit.

 

Ladite tumeur était un peu plus dure et un peu plus grosse que la première, pour la guérison de laquelle le premier-chirurgien s'était ingéré, sans nuls ordres et sans m'en donner avis, de la vouloir traiter par l'application de son emplâtre de céruse brûlée, qui n'a aucun rapport à cette manière de tumeur, ni aucune vertu pour la consumer.

 

J'ai été contraint, après avoir différé huit jours, de faire ôter ledit emplâtre, S. M. se plaignant qu'elle en recevait de l'incommodité, et que son mal augmentait avec quelque sorte de douleur, qui n'avait encore paru en cette dernière tumeur, ni en la première.

 

Au lieu dudit emplâtre, j'ai fait mettre le mien, qui, en peu de temps, a ôté la douleur, amolli la dureté et guéri entièrement ce mal, qui ne paraissait pas beaucoup dans ces commencements, mais qui pouvait augmenter et dégénérer en un mal plus fâcheux et de plus grande conséquence; et, comme j'ai fait une forte réflexion sur la première tumeur squirreuse, en cette partie où elle a parue, j'ai eu sujet d'appréhender davantage quand j'ai vu que le même mal renaissait de l'autre côté, c'est-à-dire, sur la tête de la mamelle droite, ne pouvant pas me figurer qu'un mal de cette nature pût survenir en l'âge et au tempérament du roi, s'il n'y avait quelque mauvais principe qui était de grande conséquence, et qu'il n'était pas seulement question de se servir de remèdes résolutifs, mais qu'il était nécessaire d'employer les remèdes internes pour arrêter le cours, ou plutôt la génération d'une matière qui était capable de faire quelque grand désordre dans les parties nobles dont il tenait sa racine, ou du moins produire quelque tumeur carcinomateuse quand le roi serait dans un âge plus avancé

 

Ce qui m'a fait prendre résolution de faire préparer des tablettes avec la pierre d'écrevisse, la craie, la perle, le diaphorétique.

 

Le tout m'a fort bien réussi par la grâce de Dieu (Ces engorgements glanduleux viennent encore établir la constitution lymphatique du roi) 

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